L’internat qui enfle, qui enfle…

Les manuels d’internat font partie des best-sellers des bibliothèques de médecine.

Les DCEM se jettent littéralement dessus. Ils ne peuvent pas acheter tout ce qui sort, alors ils empruntent, tous la même spécialité en même temps, en fonction des cours et des examens. Et comme nous n’avons jamais assez d’exemplaires pour eux, les emprunts donnent parfois lieu à une compétition acharnée (truandage pour se faire prolonger les prêts, emprunts croisés avec les cartes des copains – bonjour les embrouilles en cas de retard, exemplaires sciemment mal rangés ou dissimulés derrière des étagères pour que les collègues ne le trouvent pas… J’en passe et des meilleures).

Et l’intérêt pour le papier ne se dément pas. Alors que les éditeurs français, toujours frileux, commencent timidement à tendre un orteil dans le bain de l’édition électronique, les étudiants rechignent à utiliser les manuels en ligne que nous leur proposons en test. Ils veulent du bon vieux papier, qu’on peut transporter avec soi et stabiloter à loisir. Quand les tablettes auront materné les nouvelles générations, et que les ebooks ne seront plus des PDF intouchables, peut-être les choses changeront-elles… Bien sûr, ils se « contentent » de l’électronique quand ils n’ont pas le choix : pays sans bonnes bibliothèques, textbooks trop chers ou volumineux qu’on ne peut pas emprunter, manuels dont tous les exemplaires sont sortis… Surtout que tout ou presque est disponible en ligne d’une manière ou d’une autre, sans attendre que les éditeurs se décident enfin à proposer des offres électroniques cohérentes et abordables. Quand on leur parle des ebooks pendant les formations, les étudiants prennent un malin plaisir à échanger avec leurs camarades les meilleurs adresses pour télécharger tel ou tel manuel, au grand dam du formateur…

Tout ça pour dire qu’une grosse bibliothèque de médecine se doit d’acheter tout ce qui sort en internat, toutes spécialités confondues. Enfin, presque tout, car il existe quand même certaines collections tellement mauvaises que les étudiants ne les empruntent même pas… Non, je ne donnerai pas de non, consultez donc vos stats de prêts !

Sauf qu’en 2008, nous avions évalué qu’il sortait chaque année une centaine de nouveaux titres « internat », tout compris. Pour un prix moyen d’une vingtaine d’euros. Ce qui ne veut rien dire. Car les manuels d’internat appartiennent en gros à deux catégories : les petits à spirales, dans les 10 euros (difficiles à équiper et à ranger : où voulez-vous placer l’antivol ? Et la cote, vu qu’il n’y a pas de dos !?). Et les gros manuels qui dépassent les 30 euros.

Problème. Je viens de faire le bilan 2010. Et nous avons acheté 160 nouveautés ! Pour un prix moyen flirtant toujours avec les 19 euros. Mais 160, c’est plus de 50% de nouveaux titres en deux-trois ans. Ce qui entraîne un budget en hausse considérable, sachant que les manuels d’internat s’achètent parfois par paquets de 30 dans les grandes BU.

À ce problème s’adjoint la question d’un certain éditeur français, aux couvertures flashy – que je ne nommerai pas, car je suis lache. Et puis tout le monde le reconnaîtra. Éditeur connu pour sa production prolifique. Un peu trop même, puisque nous croulons sur les nouveautés, qui ont parfois un goût de réchauffé, à ce que nous en disent les étudiants. Nouvelles éditions où seule la couverture aurait changé, nouvelles collections qui reprendraient des bouts d’autres séries, coquilles en pagaille… Dommage, alors que plein de titres chez eux tiennent la route et sont de grands succès. Il n’y a pas que les bibliothécaires qui se posent des questions, puisque certains étudiants ont même lancé une idée de boycott des récentes publications de l’éditeur, jugées trop décevantes.

Tout ça pour dire qu’il y a de plus en plus d’internat, et que nous avons de moins en moins de sous pour les acheter !

Si vous connaissez les mêmes soucis, témoignez (lachez vos com, comme disent les jeunes).

  • Share/Bookmark

Tags : , , , , , , , , , , ,

Une réponse à “L’internat qui enfle, qui enfle…”

  1. NaCl dit :

    Ai découvert que la boutique de photocopies à côté de la fac avait scanné tous nos exemplaires des dernières éditions d’ECN et proposait à nos chers D4 un catalogue des scans pour des tirages photocopiés à prix cassés.
    Je me demandais aussi pourquoi les plaintes sur nos malheureux « 9″ exemplaires s’atténuaient.

Laisser un commentaire